Pourquoi chercher une alternative à Google Analytics ?
Google Analytics est un outil d’analyse web devenu quasi-hégémonique. Gratuit, puissant, intégré à Google Ads et aux autres outils de la firme de Mountain View, il est l’option par défaut pour une majorité de sites web. Pourtant, depuis plusieurs années, des critiques récurrentes émergent autour de l’usage des données personnelles, de la souveraineté numérique et du respect du RGPD. L’affaire Schrems II en 2020 a d’ailleurs rendu l’utilisation de GA juridiquement incertaine en Europe.
La promesse de collecte gratuite de données a un coût : celui de la dépendance technologique et du sacrifice de la confidentialité. Pour les entreprises soucieuses de transparence, de conformité légale et de contrôle de leurs données, le besoin d’une alternative devient évident.
C’est dans ce contexte que Matomo Analytics se positionne comme une réponse stratégique et pragmatique. Open source, respectueux de la vie privée et hébergeable en interne, Matomo replace l’utilisateur aux commandes de ses données.
Matomo : qu’est-ce que c’est ?
Matomo (anciennement Piwik) est un outil d’analyse d’audience web lancé en 2007. Contrairement à Google Analytics, il propose une architecture 100 % open source, avec la possibilité d’être auto-hébergé. Deux versions sont disponibles :
- Matomo On-Premise (hébergement sur vos serveurs)
- Matomo Cloud (hébergement par Matomo, version payante)
Sa promesse est claire : fournir des analyses granulaires tout en garantissant à l’entreprise la pleine propriété des données utilisateurs. Et ce n’est pas un discours marketing : Matomo ne transmet aucune donnée à des tiers, ne crée pas de profils publicitaires, et ne croise pas les données avec d’autres plateformes sans votre accord explicite.
Fonctionnalités clés : Matomo ne fait pas de compromis sur la puissance
On pourrait croire qu’un outil axé sur l’éthique le serait au détriment des capacités techniques. Ce n’est pas le cas ici. Matomo propose une large gamme de fonctionnalités comparables – voire supérieures – à son concurrent californien :
- Tableaux de bord personnalisables
- Suivi des événements et des conversions
- Analyse des entonnoirs de conversion
- Suivi e-commerce poussé
- Cartes de chaleur et enregistrements de sessions (avec consentement)
- Gestion multicompte et multi-site
En bonus, Matomo propose une intégration native avec WordPress, Joomla, WooCommerce, Prestashop ou encore Typo3. C’est notamment un outil out-of-the-box performant pour les PME qui font le choix d’un CMS populaire.
RGPD, CNIL et hébergement : Matomo coche toutes les cases
Depuis janvier 2022, Google Analytics (dans sa version Universal Analytics) est officiellement considéré comme non conforme au RGPD, suite à plusieurs décisions européennes. En cause : le transfert de données personnelles vers les États-Unis sans garanties suffisantes. Et même GA4, sa version nouvelle génération, ne lève pas tous les doutes juridiques.
Matomo, en revanche, offre un contrôle total sur l’hébergement des données. En l’installant sur un serveur interne ou dans un cloud européen, vous éliminez tout transfert illégal de données. De plus, Matomo intègre des fonctions de pseudonymisation des IP, de suppression automatique des logs, et respecte scrupuleusement les recommandations de la CNIL.
Fait notable : la CNIL cite explicitement Matomo comme une alternative acceptable à Google Analytics dès lors qu’il est correctement configuré.
Cas d’utilisation : qui utilise Matomo et pourquoi ?
Matomo est utilisé par plus de 1,4 million de sites web dans le monde. Parmi les organisations qui lui font confiance, on trouve :
- L’Union Européenne
- Le CNRS
- Le gouvernement britannique
- Le MIT
- Red Bull TV
Ces organisations ont toutes en commun un fort besoin de confidentialité et de souveraineté numérique. Pour les institutions publiques, c’est un impératif politique. Pour les entreprises privées, c’est un levier de différenciation en matière d’éthique numérique. Chez certains acteurs de la tech européenne, Matomo devient même un critère d’exemplarité.
Comparaison directe avec Google Analytics
Pour voir clair, détaillons point par point ce que propose Matomo comparé à Google Analytics :
- Open source : Oui pour Matomo, non pour GA
- Propriété des données : Totale avec Matomo, partagée (et floue) avec Google
- RGPD friendly : Oui avec auto-hébergement, discutable pour GA
- Support technique : Communautaire ou payant chez Matomo, documentation étendue chez GA
- Facilité d’implémentation : GA est plus plug-and-play, Matomo demande un minimum de configuration
- Partage des données : Aucune chez Matomo, automatique chez GA
- Courbe d’apprentissage : l’interface n’est pas toujours intuitive au début
- Performance : à fort trafic, un serveur mal dimensionné peut ralentir les traitements
- Intégration des campagnes : moins fluide que chez Google pour les campagnes Google Ads (évidemment)
- Installer Matomo en parallèle de GA (double tagging)
- Comparer les résultats pendant deux mois
- Former les équipes internes au nouvel outil
- Basculer complètement au terme de la période de rodage
C’est un arbitrage entre simplicité d’installation et exigence éthique. Pour un site e-commerce B2C fortement axé sur les ads et l’optimisation d’acquisition, Google conserve ses atouts. Pour des institutions publiques ou des acteurs B2B exigeants sur la confidentialité, Matomo est logique et cohérent.
Points faibles et limites de Matomo
Tout outil a ses faiblesses, et Matomo n’est pas une exception. Les limites les plus fréquemment citées par les utilisateurs sont :
Ces points sont contrebalancés par un avantage structurel : Matomo donne accès aux logs bruts, exportables, exploités facilement en data science. Là où Google propose une boîte noire, Matomo donne une vitre transparente.
Installer Matomo : pratique et réaliste pour une PME ?
L’installation de Matomo On-Premise est réaliste pour toute entreprise disposant d’un hébergement basique (VPS, mutualisé avec accès en FTP). Son équipe technique propose une documentation claire et un support réactif. En alternative, la version cloud gérée est facturée à partir de 19 €/mois, ce qui reste abordable comparé aux enjeux juridiques et techniques couverts.
Une organisation qui veut migrer intelligemment peut procéder par étapes :
Cette logique de transition établi une courbe d’adoption progressive, sans perte de repères pour les analystes.
Vers une tendance de fond : analytics plus responsables
Au-delà de Matomo, un changement profond est en cours dans la manière dont les entreprises envisagent l’analyse de données. On passe d’une logique « maximaliste » — collecter tout, tout le temps — à une approche « sobriété numérique », où la qualité prime sur la quantité, et la conformité sur la complétude.
L’évolution réglementaire (RGPD, DMA, ePrivacy) pousse dans cette direction. Mais c’est aussi une attente des consommateurs : selon une étude Cisco (2022), 76 % des Européens affirment être plus enclins à faire confiance à une marque qui leur donne un vrai contrôle sur leurs données personnelles.
Matomo s’inscrit parfaitement dans cette mutation. Il permet de garder un niveau élevé de performance analytique, tout en repositionnant la maîtrise des données au cœur de la stratégie digitale.
Faut-il sauter le pas ?
Si votre organisation a une culture de la donnée, une volonté de conformité et une exigence en matière d’éthique numérique, Matomo coche les bonnes cases. L’adoption de cet outil n’est pas qu’un choix technique : c’est une décision stratégique.
Ce n’est pas pour rien que de plus en plus d’institutions publiques, d’hébergeurs européens ou d’éditeurs indépendants franchissent le pas. L’enjeu ? Arrêter d’offrir gratuitement une matière première sensible — la donnée utilisateur — à une entité qui la monétise selon ses propres logiques, souvent opaques.
En misant sur Matomo, vous reprenez possession de vos données, vous renforcez la transparence et vous montrez à vos utilisateurs que leur vie privée n’est pas une variable d’ajustement — mais une composante centrale de votre stratégie numérique.